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Interview. Mohamed Kacimi Alaoui (CNEM): «Pourquoi nous nous opposons à l’intégration des étudiants d’Ukraine»

Interview. Mohamed Kacimi Alaoui (CNEM): «Pourquoi nous nous opposons à l’intégration des étudiants d’Ukraine»

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La Commission nationale des étudiants en médecine (CNEM) s’oppose à l’intégration des étudiants revenus d’Ukraine dans les CHU et universités du royaume. Ni9ach21 a interrogé un responsable de la Commission à ce sujet.

Dès que l’éventuelle possibilité d’intégrer dans le système national les étudiants marocains revenus d’Ukraine a été mise sur la table, des voix se sont élevées pour s’y opposer. Parmi elles, la Commission nationale des étudiants en médecine (CNEM). Après avoir signifié son refus lors d’une Assemblée générale, la CNEM a publié, le 20 mars courant, un communiqué à cet égard. Dans ce document relayé sur les réseaux sociaux, le groupe dénonce tout d’abord les différents problèmes auxquels font face les étudiants en médecine, dont le surpeuplement dans les universités publiques du royaume ainsi que le manque de communication de la part des responsables et des ministères concernés avec les étudiants.

Ensuite, quant à l’intégration des étudiants marocains d’Ukraine dans les CHU et universités du royaume, la CNEM exprime son opposition. «La situation difficile au sein des CHU et universités marocaines, et toutes les difficultés rencontrées par les étudiants en termes de formation nous obligent à écarter cette possibilité et de chercher d’autres solutions qui n’impactent pas la qualité de la formation», dit le communiqué. Mohamed Kacimi Alaoui, coordinateur national de la CNEM, nous en dit plus dans cet entretien.

Pourquoi êtes-vous contre l’intégration des étudiants marocains revenus d’Ukraine?

Avant tout, nous considérons ces étudiants comme nos frères et sœurs. Mais leur intégration risque de rendre la situation plus difficile qu’elle ne l’est déjà. Ce qu’il faut savoir, c’est que cette histoire date de bien avant la guerre en Ukraine. Depuis une dizaine d’années, nous demandons que l’amélioration de la situation de la formation en médecine au Maroc soit revue. On a eu des promesses du gouvernement et des parties prenantes en 2019. Mais près de 3 ans après, on s’est rendu compte qu’a peine 5% de ces promesses ont été réalisées.

Tout cela pour dire que nous n’avons aucun problème avec les étudiants d’Ukraine, mais malheureusement, nos infrastructures actuelles ne permettent pas l’intégration d’encore plus de personnes alors qu’on souffre déjà de surpeuplement. A titre d’exemple, l’on peut trouver dans un seul service hospitalier dans les CHU pas moins de 80 stagiaires et seulement 3 ou 4 enseignants. Ces derniers se retrouvent donc dans l’obligation de régir un système de rôle. Et c’est ainsi que la qualité de la formation baisse drastiquement.

Le gouvernement compte imposer cette décision au détriment de la qualité de la formation. Or, c’est au gouvernement de prendre ses responsabilités pour trouver les solutions adéquates.

Quelles alternatives proposez-vous?

Depuis le début de cette affaire, nous avançons des arguments rationnels basés sur la logique. Ces étudiants ont la possibilité d’intégrer des universités européennes dont le modèle de formation ressemble plus à celui de l’Ukraine. Le modèle de formation marocain, lui, ressemble plutôt à celui des pays francophones. C’est pour cela qu’il serait plus juste que ces étudiants intègrent des universités en Roumanie, en Moldavie ou encore en Allemagne. D’ailleurs, ces pays se sont proposer à cet effet.

Vous parlez de problèmes dont souffrent les étudiants en médecine. Pouvez-vous élaborer ?

Le premier point, c’est le statut social de l’étudiant en médecine. Un étudiant en 6e année de médecine perçoit une indemnité de 630 dirhams par mois. Si le ministère cherche vraiment à valoriser le métier et les étudiants médecins, il faut les récompenser dans les normes. C’est l’un des secteurs les plus laissés à l’abandon. Le deuxième point, et le plus important, ce sont les terrains de stages. Actuellement, ceux-ci sont très peu, même pour les normes «humaines». En matière d’infrastructures, il faut que le gouvernement fasse plus d’effort. Il est grand temps d’aller vers l’avant et de construire de nouveaux CHU, ce qui fera du bien et au peuple et aux étudiants, qui pourront effectuer leurs stages comme il le faut et non à tour de rôle.

Le troisième point concerne la gouvernance. Nous dépendons de deux ministères, à savoir l’Enseignement supérieur et la Santé, mais le niveau de coordination entre ces deux départements reste faible. Les décisions se prennent unilatéralement, et cela crée plusieurs problèmes. Dans d’autres pays, c’est une instance prérogative qui décide et gère tout ce qui touche à l’enseignement en médecine.

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